Baisse record de la consommation de gaz : le piège qui menace l'avenir du réseau GRDF

Entre 2019 et 2024, la consommation de gaz résidentiel en France s'est effondrée de 25 %, une rupture sans précédent qui redessine le paysage énergétique national. Loin d'être un simple ajustement conjoncturel, cette baisse historique est le résultat d'une "tempête parfaite" où trois facteurs majeurs se sont conjugués : une flambée des prix forçant la sobriété, une érosion structurelle du nombre d'abonnés, et une succession d'hivers remarquablement doux qui a facilité cette transition.
Entre 2019 et 2024, la consommation de gaz par les ménages en France a chuté d’environ 25 %, une baisse sans précédent. Cette évolution résulte d’une conjonction de trois facteurs principaux :
- Flambée des prix du gaz, rendant le chauffage au gaz beaucoup plus coûteux.
- Diminution du nombre d’abonnés au réseau de gaz : de nombreux foyers quittent le gaz ou remplacent leur équipement.
- Hivers exceptionnellement doux, qui réduisent naturellement les besoins de chauffage.
Ces évolutions provoquent un cercle vicieux : moins de consommation + moins de clients = coûts fixes du réseau plus élevés par client restant → cela augmente les tarifs d’acheminement (les frais pour transporter et distribuer le gaz), ce qui peut à son tour pousser davantage de consommateurs à abandonner le réseau.
L’article aborde aussi la réglementation (RE2020) qui rend difficilement viable l’installation de nouvelles chaudières à gaz dans les logements neufs, encouragée par des aides comme MaPrimeRénov’, et évoque la possibilité d’un démantèlement partiel du réseau, notamment dans les zones peu denses ou moins utilisées, ou de sa reconversion partielle (ex : vers le transport de biométhane).
Points clés à retenir
- Baisse massive de consommation : −25 % en cinq ans pour le gaz résidentiel. Selectra
- Perte d’abonnés : environ 4 % des foyers au niveau national, soit près de 430 000 compteurs en moins.
- Disparités territoriales marquées : certains départements (ex. Pyrénées-Orientales, Aube, Aude) voient des baisses très fortes (~30-40 %), d’autres beaucoup plus modérées.
- Prix du gaz multiplié : les factures ont fortement augmenté (ex. +59 % entre 2019-2024 pour un logement type) ; sur une période plus longue, +102 % entre juin 2016 et septembre 2025 pour une consommation de référence.
- Coûts fixes du réseau : entretien, sécurité, transport imposent des charges incompressibles. Moins d’usagers = coût moyen amorti plus lourd.
- Réglementation environnementale : la RE2020 interdit l’installation de certaines chaudières à gaz dans les bâtiments neufs selon les seuils d’émissions.
- Aides à la rénovation : encouragent le remplacement des chaudières au gaz par des solutions plus vertes (pompes à chaleur, etc.).
- Hivers doux comme facteur « amplificateur ».
- Démantèlement partiel ou reconversion probable du réseau de gaz dans certaines zones : celles à faible densité ou peu utilisées.
Vers un démantèlement partiel du réseau de gaz ?
La chute continue de la consommation et du nombre d'abonnés rend la question de l'avenir de l'infrastructure gazière inévitable. Maintenir en l'état un réseau de plus de 200.000 km pour de moins en moins d'usagers risque de faire peser un fardeau financier insoutenable sur les derniers consommateurs, souvent les ménages les plus modestes, qui devront payer des coûts d'acheminement de plus en plus élevés.
Il ne s'agit pas de démanteler l'ensemble de l'infrastructure, mais de cibler des portions dont le maintien n'est plus économiquement ou techniquement justifié. Selon la CRE, 3 à 5 % des kilomètres de canalisations de transport devraient être abandonnés d'ici à 2050.
Cette stratégie de décroissance ciblerait en priorité les zones où le réseau est le moins dense et où la consommation est historiquement faible, comme dans certaines parties de l'ouest de la France. L'objectif serait d'éviter les surcoûts liés à l'entretien de bouts de réseau ne desservant que quelques clients. En revanche, les réseaux très denses du nord et de l'est, héritage de l'histoire industrielle, resteraient la colonne vertébrale du système.