L’IDDRI alerte sur des tensions croissantes dans le biométhane
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L’Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI) alerte sur plusieurs tensions qui apparaissent ou risquent de se renforcer à mesure que la filière biométhane se développe. Ces tensions concernent surtout les ressources, les coûts, les usages et les impacts environnementaux. Voici les principaux points mis en avant :
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Mobilisation de la biomasse / disponibilité des intrants
- Le potentiel global théorique de biomasse mobilisable situe le gisement entre 100 et 170 TWh de biométhane, ce qui pourrait suffire à atteindre certains objectifs à moyen et long terme.
- Mais ce potentiel ne garantit pas que tous les intrants requis seront disponibles partout, ni à coûts acceptables. Il y a déjà des déséquilibres régionaux : dans certaines régions, la biomasse nécessaire pour alimenter les méthaniseurs projetés dépasse ce qui est localement disponible.
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Coûts élevés et incertitudes économiques
- Les coûts d’investissement demeurent élevés, avec peu de baisse significative enregistrée jusqu’à présent. Cela pèse fortement sur la rentabilité des projets.
- Le soutien public nécessaire pour atteindre les objectifs fixés est conséquent. L’IDDRI indique que pour les volumes envisagés à l’horizon 2030, les dépenses publiques pourraient atteindre entre 2 et 3 milliards d’euros par an si les conditions actuelles (coûts, soutien, mobilisation de biomasse) restent inchangées.
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Agro-environnement et durabilité
- Les bénéfices environnementaux sont jugés « modérés » et très hétérogènes selon les sites et modalités. Certains usages de la biomasse, ou certaines pratiques agricoles associées, pourraient générer des impacts négatifs : perte de biodiversité, dépendance aux intrants chimiques, appauvrissement des sols, etc.
- Le changement climatique lui-même peut peser sur la productivité des biomasses (sécheresse, aléas), ce qui limite les rendements futurs et augmente l’incertitude.
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Risques de conflits d’usage
- La biomasse ferme déjà plusieurs usages : alimentation animale, cultures alimentaires, matières organiques pour le sol, usages énergétiques ou non-énergétiques. L’accroissement de la demande en biométhane risque de créer des arbitrages difficiles entre ces usages.
- À l’échelle locale ou régionale, ces conflits peuvent devenir concrets : par exemple, la paille ou les sous-produits de betteraves, etc., entre ceux qui veulent les utiliser pour alimentation animale ou pour méthanisation.
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Objectifs ambitieux vs capacités réelles
- Les objectifs politiques (multiplication par ~4 de la production à l’horizon 2030, ~12 à l’horizon 2050) sont jugés possibles théoriquement d’après les gisements, mais leur réalisation pose des risques importants : coûts élevés, disponibilité de biomasse, et limites agroécologiques.
- L’IDDRI recommande de mieux hiérarchiser les usages du biométhane, de réévaluer régulièrement les scenarii, et de ne pas s’engager aveuglément dans des objectifs qui pourraient s’avérer coûteux ou nuisibles s’ils ne sont pas bien encadrés.
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